Le BTP comptait en 2023 17.9% d’intérimaires, personnel le plus exposé aux accidents graves et mortels avec près de 56% du total des accidents mortels en 2021. Une campagne nationale a d’ailleurs été lancée en 2024 sur le sujet (pour en savoir plus : Campagne nationale sur la prévention des accidents du travail graves et mortels)
Une étude menée par l'OPPBTP et l'ANACT a déterminé 3 grands axes de travail
1. Valider les compétences :
La personne est-elle qualifiée pour la mission qui lui est affectée ? A-t-elle les bonnes formations ? L’expérience nécessaire ?
2. Adapter les conditions de travail,
Quel type de travail, notamment physique comparé aux salariés et autres personnes sur le chantier ?
3. Gérer ls nouveaux arrivants,
Existance d'un accueil sécurité, accompagnement, découverte du poste de travail, des consignes et dangers.
Si l'on va un peu plus loin …
1. Le choix d’un intérimaire doit être cadré, sa future mission bien détaillée afin que l’entreprise d’intérim propose la personne la plus apte au poste. Cela n’empêche par l’entreprise d’accueil de vérifier, soit revalider certains aspects de la formation pour s’assurer que la personne maîtrise le sujet.
Ce dernier point sera complété par l’accompagnement terrain (point 3).
A noter aussi que certains travaux sont interdits aux intérimaires (L. 4154-1 et L.1251-10) sauf cas dérogatoire. Si le salarié intérimaire est à un moment affecté à une autre tâche, il conviendra et de prévenir l’agence d’intérim et de refaire un point sur l’adéquation du poste et des compétences.
2. Les entreprises ayant tendance à concentrer leur embauche sur le personnel qualifié, les intérimaires se retrouvent souvent sur des tâches plus physiques, un rythme de travail plus soutenu, bref, des conditions de travail moins bonnes que leurs collègues embauchés. Heureusement, tâches physiques plus intenses ne rime pas forcément avec tâches plus dangereuses. Néanmoins, une étude de la DARES de 2018 confirme une surexposition au TMS chez les intérimaires.
3. L’intérimaire arrive parfois dans des conditions d’urgence, une personne malade, un imprévu sur le chantier… On attend de lui qu’il s’intégre et soit opérationnel rapidement. Pour autant, il convient, avant toute chose, de bien préparer son travail : accueil sécurité générique (sur le chantier), formation renforcée sur le poste à venir, consignes de l’entreprise d’accueil, présentation de l’organisation et des risques sur le chantier, vérification des connaissances (potentiellement avec tests pratiques sur les postes avec habilitation), compétences, expérience, EPIs et bonne utilisation, démonstration d’utilisation des outillages électroportatifs ou autres… Certes, cela prend un peu de temps, mais il s’agit d’un temps indispensable pour préserver le nouvel arrivant d’un risque d’accident par méconnaissance du terrain. De même, il sera pertinent de le présenter à l’équipe et de lui affecter un « tuteur » pendant les premiers temps, personne chargée de lui expliquer au fur et à mesure les problématiques et de s’assurer que l’intérimaire sait réagir correctement et comprend bien ce qui lui est demandé. Cette personne devra connaître le profil de l’intérimaire et avec le responsable du chantier s’assurer qu’il soit affecté à des missions non adaptées à ses compétences.
En résumé, lors de l’arrivée d’un intérimaire, pour sa sécurité, voici les mots clés de l'OPPBTP :
J’anticipe (en tant que manager, responsable, sécurité, chef de projet/chantier, service RH, encadrant de travaux)
J’accueille (à la charge de l’encadrant de chantier ou du responsable hiérarchique, contremaître…)
J’accompagne (à la charge de l’encadrant de chantier et du tuteur qui sera affecté au nouvel intérimaire. Cela n’exclut par la participation des collègues qui ont aussi la responsabilité (R4121-2 code du travail) de veiller à la sécurité de leur nouveau collègue de travail. Pour un bon accueil, la vigilance de tous est primordiale !
Source : Rapport d’étude sur sur l’amélioration des conditions de travail et de santé pour les salariés intérimaires du BTP
Quels axes d’amélioration propose le rapport ?
Travailler en amont avec l’entreprise d’intérim pour une meilleure connaissance des contraintes du BTP (et donc adapter les profils proposés), définir un référentiel de compétences commun et surtout travailler ensemble à l’analyse des éventuels accidents et aux actions de prévention qui suivront.
De même, des partenariats de formation peuvent être envisagés sur les métiers en tension. L’idée est que l’agence d’intérim s’engage à former et faire monter en compétence des personnels peu ou pas qualifiés en échange d’un volume d’heures de travail par l’entreprise utilisatrice.
Renforcer l’accueil sécurité et l’intégration du nouvel arrivant intérimaire tel que décrit plus haut. La mise en place d’un livret d’accueil par exemple et un accueil sécurité suffisamment long sont les premières choses à mettre en place.
Privilégier les intérimaires titulaires du PASI BTP ® (Passeport Sécurité Intérim, qui reprend les bases de la sécurité sur les chantiers. Cette formation de 2 jours donne lieu à une attestation). En complément : PASI BTP®
Formaliser la formation sécurité renforcée pour garantir que les procédures et consignes sont bien diffusées et comprises, avec un test de validation de connaissances avant prise de poste est aussi une bonne solution. Reste bien sur à ce que chacun sache ce qu’il a à faire dans l’accueil du nouveau parmi les encadrants, de la vérification administrative au tutorat et à l’évaluation en fin de mission.
Former les encadrants / tuteurs. Encadrer un nouveau n’est pas aussi simple qu’il y paraît. Les responsabilités et attentes doivent être cadrées. Il est donc nécessaire que l’entreprise utilisatrice forme ces personnes afin qu’elles soient le plus efficace possible dans leur rôle de tuteur.
Réfléchir à la communication avec le personnel étranger qui peut ne pas bien maîtriser le français : consignes et affiches visuelles avec peu ou pas de mots, traductions sur les éléments les plus importants ?
Demander un retour par les collègues en place sur l’intérimaire lors de son départ. Cela peut permettre petit à petit de se constituer une liste de personnes adaptés au poste et qui, si elles sont rappelées régulièrement s’intégreront plus vite et mieux car elles connaitront l’entreprise. Cela suppose un accord avec l’agence d’intérim pour privilégier ces salariés envers l’entreprise utilisatrice.
En complément :
Module de sensibilisation Compagnons Intérim de l’OPPBTP
Rapport d’étude sur sur l’amélioration des conditions de travail et de santé pour les salariés intérimaires du BTP