Un décret de juin 2023 avait précisé des modalités relatives à la protection des travailleurs contre les risques dus aux rayonnements ionisants, et notamment le rôle des services de prévention et de santé au travail (SPST), avec notamment la création des articles R. 4451-85 et R. 4451-86 dans le code du travail.
L’article R. 4451-85 prévoit que le médecin du travail et les professionnels de santé au travail placés sous son autorité doivent suivre une formation spécifique préalable sur les risques liés aux rayonnements ionisants et sur le dispositif de surveillance dosimétrique individuelle. Un arrêté devait déterminer le contenu de cette formation (ainsi que les modalités de son renouvellement), les modalités de reconnaissance des connaissances, des compétences et de l'expérience du professionnel de santé au travail, et enfin les conditions pour qu'un organisme de formation puisse dispenser cette formation.
L’article R. 4451-86 prévoyait un agrément complémentaire pour les SPST pour pouvoir assurer le suivi des travailleurs exposés aux rayonnements ionisants. Délivré pour une durée de cinq ans, celui-ci est basé sur un cahier des charges national établi par arrêté conjoint.
Ces deux sujets constituent l’objet d'un arrêté du 6 août 2024, publié au Journal officiel le 14 août.
Formation des professionnels de santé
Concernant le contenu de la formation spécifique pour assurer le suivi individuel renforcé des travailleurs exposés aux rayonnements ionisants, l’arrêté précise d’abord que celle-ci est délivrée en fonction de deux catégories de professionnels de santé au travail :
- catégorie 1 « infirmier », pour l'infirmier de santé au travail ;
- catégorie 2 « médecin », pour le médecin du travail, le collaborateur médecin ou l'interne en médecine du travail.
Elle peut être assortie de modules complémentaires en fonction du type d'exposition des travailleurs suivis :
- 1° Module a : « travailleurs à risque d'exposition interne » ;
- 2° Module b : « travailleurs exposés au radon provenant du sol » ;
- 3° Module c : « travailleurs intervenant en situation d'urgence radiologique » ;
- 4° Module d : « travailleurs exposés aux neutrons ».
La participation à ces modules est facultative pour les infirmiers, sauf si le médecin leur délègue des missions en lien avec le contenu de ces modules.
L’arrêté indique que cette « formation spécifique des professionnels de santé au travail et ses modules complémentaires comportent des connaissances théoriques et pratiques, ainsi que des mises en situation dont le contenu détaillé et la durée minimale sont définis aux annexes I, II et III ».
L’annexe I précise le contenu de la formation pour la catégorie 1 « infirmier » (au moins 14,5 heures), l’annexe II pour la catégorie 2 « médecin » (au moins 28 heures) et l’annexe III décrit le contenu minimal des quatre modules a, b, c et d.
Autre précision importante tant le nombre de formations proposées en distanciel augmente, cette formation spécifique et les modules complémentaires doivent être dispensés en présentiel (sauf en cas de circonstances exceptionnelles définies par voie réglementaire).
Le texte précise d’autres modalités comme le fait que des internes ou collaborateurs médecins qui ont commencé la formation spécifique peuvent aussi débuter le suivi individuel renforcé de travailleurs exposés aux rayonnements ionisants, mais uniquement sous la supervision d'un médecin du travail qui assure ce suivi depuis au moins un an.
On peut noter que les professionnels de santé au travail disposent d'un an à compter du début de leur formation pour obtenir les attestations correspondantes. Ces attestations de réussite ont une durée de validité de cinq ans. Elles doivent contenir le nom du professionnel de santé et son numéro d'identification du répertoire partagé des professionnels intervenant dans le système de santé (RPPS), ainsi que le nom de l'organisme de formation ayant délivré l'attestation.
La formation initiale des infirmiers en santé au travail peut proposer une option intégrant le contenu de cette formation spécifique (selon l'annexe I), et c'est aussi la cas pour la formation initiale des médecins du travail (selon l'annexe II), en respectant les durées minimales.
Le texte liste aussi des diplômes universitaires qui peuvent permettre une demande d’attestation d’équivalence.
Renouvellement des connaissances
La formation spécifique et les modules complémentaires associés font l'objet d'une mise à jour des connaissances :
- soit sous la forme d'une formation de renouvellement tous les cinq ans en présentiel, et dont la durée est d'au moins la moitié des durées minimales respectives fixées aux annexes I, II et III ;
- soit sous la forme d'une formation continue annuelle d'une durée d'au moins sept heures, dédiée à des contenus définis aux annexes I, II ou III. Le professionnel de santé au travail satisfait à cette obligation lorsqu'il a réalisé au moins cinq sessions de formation sur cinq ans. La participation à distance n'est possible que dans la limite de deux sessions sur cette même période.
Comme la formation initiale, ces formations de renouvellement font aussi l’objet d’une évaluation qui donne lieu à une nouvelle attestation de formation, qui doit préciser la mention de la modalité de mise à jour des connaissances suivie. Le texte précise le contenu de cette formation de renouvellement. Celle-ci doit notamment contenir « un descriptif d'activité de cinq pages maximum transmis par chaque stagiaire à l'organisme de formation au moins dix jours avant le début de la formation ». Il est rédigé « à partir de son retour d'expérience en matière de suivi individuel renforcé et comporte des exemples précis, notamment sur les difficultés rencontrées ».
En plus d’une partie théorique consacrée aux évolutions notamment réglementaires, intervenues dans les cinq dernières années, la formation comprend également une partie pratique avec un partage d'expériences entre stagiaires, réalisé à partir du descriptif d'activité et portant sur le suivi individuel renforcé des travailleurs exposés, des mises en situation, dépourvues de toute mention nominative, analysées et commentées, et un accompagnement dans l'utilisation de SISERI et d'autres outils numériques nécessaires notamment pour le calcul de dose.
Enfin, l’arrêté donne les conditions pour dispenser la formation, d’une part les qualifications de l'organisme dispensant la formation (articles 11 à 14) ou bien les conditions dans lesquelles les SPST d’une même entreprise peuvent assurer cette formation (article 15).
Sur tous ces éléments relatifs à la formation, l'arrêté est entré en vigueur le 15 août.
Agrément complémentaire des SPST
L’arrêté définit les critères du cahier des charges pour l’agrément complémentaire du SPST chargé d’assurer le suivi individuel renforcé des travailleurs exposés à des rayonnements ionisants.
Ceux-ci sont :
- la validité ou la demande concomitante d'agrément ;
- la délimitation de la compétence géographique demandée par le service, dans la limite régionale, pour l'agrément complémentaire ;
- les attestations en cours de validité de la formation spécifique et, le cas échéant, des modules complémentaires (a, b, c et d) ;
- le nombre de professionnels de santé au travail du service disposant d'une attestation de formation spécifique et des modules complémentaires en cours de validité adaptés aux travailleurs suivis ;
- le nombre maximum de travailleurs exposés, souhaité par le service, pouvant faire l'objet d'un suivi individuel renforcé, en justifiant l'adéquation de ce nombre avec le nombre de professionnels formés au suivi et les autres moyens alloués.
On peut noter que l'autorité administrative compétente vérifie - pour évaluer l'adéquation entre les deux derniers points - que le nombre de travailleurs exposés suivis n'excède pas, pour un médecin du travail à temps plein :
- 900, s'il ne suit que des travailleurs exposés faisant l'objet d'un classement en catégorie A ou faisant l'objet d'examens complémentaires réguliers en dosimétrie interne (ce nombre peut être porté à 1 500 si le médecin est assisté d’autres professionnels de santé formés) ;
- 3 000, s'il ne suit que des travailleurs exposés faisant l'objet d'autres suivis que ceux mentionnés au point précédent (ce nombre peut être porté à 3 800 si le médecin est assisté d’autres professionnels de santé formés).
Pour les demandes d’agrément complémentaire, la date d’entrée en vigueur de cet arrêté est le 1er janvier 2026. A compter de cette date, les professionnels de santé au travail qui ne sont pas titulaires de l'attestation de formation, ou d'un diplôme équivalent ne pourront pas assurer le suivi individuel renforcé des travailleurs exposés aux rayonnements ionisants, et seuls les services de santé au travail agréés assurent ce suivi individuel renforcé.