Les Agents Chimiques Dangereux (ACD) sont des substances ou mélanges (aussi appelés produits) qui présentent un ou plusieurs risques pour l’environnement et/ou la santé et la sécurité des personnes qui les utilisent ou les manipulent. On les trouve partout, chez nous comme en entreprise. Leur présence fréquente, parfois leur absence de couleur ou d’odeur en font des dangers qui semblent anodins ou sans gravité. Combien de personnes pensent encore que s’il n’y a pas d’odeur, c’est que le produit ou la substance n’est pas dangereux ? Et qui s'attache à un bon stockage de ses produits de bricolage ou nettoyage à la maison ?
Ce paragramme traite des informations importantes à connaître en matière de risque chimique à l’exclusion de l’amiante.
Obligations de l’employeur en matière de risque chimique
- L’évaluation du risque chimique est une obligation réglementaire (art R4412-5 et 61 du code du travail) sous la responsabilité de l’employeur. L’objectif est de classifier les différents produits ou substances en fonction de leurs propriétés, de l’exposition des travailleurs (durée, fréquence, dangerosité, conditions d’utilisation, protections en place (EPC/EPI)…). Une fois déterminée, cette évaluation doit être intégrée au DU (Document Unique).
En parallèle, un contrôle de l’exposition des salariés par mesure des VLEP (valeurs limites d’exposition professionnelles réglementaires) et VLB (Valeurs limites Biologiques (plomb par exemple)) doit être effectué régulièrement mais aussi en cas de modification pouvant impacter l’exposition du personnel (nouveau produit, nouvel équipement, nouveaux locaux…). En cas de dépassement des valeurs limites, les postes de travail concernés doivent être arrêtés jusqu’à ce qu’une solution soit trouvée. - De même, l’employeur doit disposer et maintenir à jour une « liste actualisée des travailleurs exposés aux agents chimiques dangereux très toxiques, toxiques, nocifs, corrosifs, irritants, sensibilisants, cancérogènes, mutagènes et toxiques de catégorie 3 pour la reproduction ainsi qu'aux agents cancérogènes mutagènes et toxiques pour la reproduction définis à l'article R. 4412-60. Cette liste précise la nature de l'exposition, sa durée ainsi que son degré, tel qu'il est connu par les résultats des contrôles réalisés » (R4412-40 code du travail).
- Enfin, les FDS doivent être à disposition des salariés au poste de travail et des notices produits affichées sur les lieux d’utilisation.
Comment reconnaître un Agent Chimique Dangereux (ACD) ?
Les ACD se retrouvent sous toutes sortes de forme : liquide, gazeuse, poudre, poussière, fumée, brouillard….. S’il s’agit d’un produit (ou d’une substance) dans son « état initial » (donc que l’on vient d’acheter par exemple), un bon moyen de connaître sa dangerosité est de vérifier les étiquetages sur l’emballage et la FDS (fiche de données de sécurité). Par contre, lorsque ces produits ont été utilisés, ils peuvent se transformer (sous l’effet de la chaleur, de la présence d’autres produits ou substances...). Peuvent alors apparaître des produits de décomposition dont la dangerosité est beaucoup plus complexe à évaluer.
Les pictogrammes
C’est le moyen le plus facile et rapide d’identifier si une substance ou produit est dangereux. Mais attention, tous les ACD n’ont pas de pictogrammes (ex : effets sur l’allaitement, les gaz inflammables de catégorie 2, certains explosifs...). La lecture complète de la FDS et de l’étiquette avec les mentions de danger, d’avertissement et les conseils de prudence est donc primordiale !
Les mentions de danger
Elles décrivent la nature et le degré du danger : H2xx pour les dangers physiques, H3xx pour les dangers pour la santé, H4xx pour les dangers pour l’environnement plus quelques mentions additionnelles.
La FDS (Fiche de données de sécurité)
C’est un élément qui peut paraître compliqué et fastidieux. Il est donc recommandé de mettre à disposition du personnel non seulement la FDS mais aussi une notice produit qui reprend les informations essentielles pour le poste. Courte et facile à lire, elle sera plus facilement utilisée et comprise par les salariés. Dans tous les cas, la FDS et sa notice doivent être expliquées aux futurs utilisateurs.
La FDS contient 16 rubriques. Elle doit être fournie gratuitement, sur demande et dans la langue du pays utilisateur. Surveillez sa date de création ; même s’il n’existe pas de durée maximale, il est conseillé de s’interroger sur toute FDS de plus de 3 ans. La FDS va fournir :
- Des informations générales sur le produit et le fournisseur
- Les dangers du produit (santé, environnement, inflammabilité, explosivité, pH…)
- Son utilisation (Epi, EPC, stockage, VLEP, restrictions…)
- Les mesures d’urgence
- Le transport et l’élimination des produits
- Certaines contiendront une annexe souvent longue mais intéressante sur les scénarii d’exposition
L’INRS recommande de conserver les FDS 10 ans, même si les produits ne sont plus utilisés (attention, pour certains produits / substances, les délais de prise en charge d’une maladie professionnelles sont particulièrement long. Il conviendra alors d’avoir une durée de rétention adaptée – exemple : l’amiante avec un délai de reconnaissance de 40 ans).
Le cas particulier des CMR
Les agents chimiques cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR) sont soumis à des règles plus strictes que les autres ACD. Tout d’abord, quelle que soit leur catégorie, il convient de limiter leurs quantités et le personnel exposé et de gérer les déchets de façon spécifique.
Comment déterminer si un ACD est CMR ?
- Le règlement CLP (seul classification réglementaire pour l’Europe) va classer les CMR en 1A (potentiel cancérigène avéré), 1B (potentiel cancérogène/mutagène/reprotoxique supposé) et 2 (potentiel cancérogène/mutagène/reprotoxique suspecté).
- Le CIRC (Centre de recherche International sur le cancer) travaille en collaboration avec l’OMS et a un système de classification différent mais reconnu internationalement.
Groupe1 : cancérogène pour l’homme
Groupe 2A : probablement cancérogène pour l’homme
Groupe 2B : peut-être cancérogène pour l’homme
Groupe 3 : inclassable pour sa cancérogénicité sur l’homme
Groupe 4 : probablement pas cancérogène pour l’homme
Comment gérer la présence d’un CMR de catégorie 1A oiu 1B sur un lieu de travail ?
L’article R4412-70 du code du travail rappelle les mesures à prendre qui sont en ligne avec les principes généraux de prévention
- Suppression
- Substitution
Pour les agents du groupe 1A et 1B (selon le règlement CLP), la suppression ou la substitution sont obligatoires, sauf si l’employeur peut prouver une impossibilité technique et montrer que des tentatives de substitutions ont été tentées. Dans ce cas les mesures suivantes s’appliquent :
- Système en vase clos
- Protections collectives
- Mesures d’hygiène et d’urgence
- Protections individuelles
Bien entendu, il convient de rajouter l’information, la formation des travailleurs et un suivi médical renforcé à ces obligations.
Les substances extrêmement préoccupantes (SVHC -Substances of very high concern)
- Elles comprennent les CMR 1A et 1B, les PBT et les vPvB. Les connaître est stratégiquement important car à partir du moment où ces substances sont référencées sur la liste candidate du règlement REACH, leur durée de vie sera limitée et leur utilisation plus restrictive et complexe. En effet, même si une autorisation d’utilisation est délivrée, elle est limitée dans le temps.
- La liste candidate est mise à jour tous les 6 mois.
- Voici quelques annexes à connaître et à consulter de temps en temps :
o Annexe XIII : Liste des PBT (substances persistantes, bioaccumulables et Toxiques) et vPvB (très persistantes et très bioaccumulables) sont listées en annexe 13
o Annexe XIV : substances soumises à autorisation
o Annexe XVII : substances avec restrictions
Le stockage des produits chimiques
- Dernier sujet à traiter mais pas des moindres car les catastrophes de Beyrouth, AZF ou Lubrizol sont là pour nous rappeler à quel point cela peut être critique. Nous n’aborderons ici qu’une partie bien spécifique : les règles de compatibilité. Pour les autres notions, merci de vous référer à l’onglet thématiques environnement.
Reconnaissons-le, former son personnel à la compatibilité des produits chimiques est un véritable challenge ! Et c’est pourtant capital. Car si certains produits peuvent être stockés ensemble, d’autres doivent être isolés, séparés. Partir du principe que des produits avec un même pictogramme sont compatibles est une règle assez fiable à deux exceptions près : les corrosifs et les explosifs. Sans oublier le cas particulier des produits non étiquetés.
- Il existe pourtant quelques moyens mnémotechniques pour aller plus loin. Dans tous les cas, il est préconisé d’apposer une affiche mémo à chaque zone de stockage.
Le risque chimique est un danger présent dans toute entreprise dans des proportions variables. En revanche, la difficulté de sensibilisation du personnel est souvent assez similaire quels que soient les produits manipulés. La routine, la non perception du risque, la négligence, l’absence de structure adaptée (que ce soit le lieu de stockage ou le matériel) peuvent vite entraîner des effets dominos dévastateurs. La gestion des déchets, le matériel de protection… autant de sujets pointus à faire passer de façon simple.
Pourtant, former sur les dangers des produits chimiques et la compatibilité des produits peut se faire facilement, efficacement et avec plaisir dans le cadre d’un serious game, surtout s’il est associé à une phase d’expérimentation pour tester « pour de vrai » que, non, le formateur n’exagère pas plus que le chef ! Et que oui, il faut être très vigilant avec les produits chimiques.
Pour cela, "Mix'n boum" ou "Tic Tac Ouf" associés à une phase d'expérimentation par une chimiste qualifiée sont des serious games qui sauront immanquablement "parler" à vos équipes ainsi qu'au personnel d'encadrement. Car la partie démonstration reste toujours impressionnante et au-delà de tous les mots ! L'ensemble des autres jeux peut intégrer une partie risque chimique ludique et efficace mais sans expérimentation.
A lire aussi :
En complément :